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Ce témoignage n’est pas tiré d’internet mais il a été réalisé et écrit par un membre du groupe.

Témoignage.

J'imagine ne pas être la première à témoigner, mais je sais à quel point chaque parcours est différent, et combien savoir que l'on est pas seule est bénéfique lors de la guérison. Cela nous donne de l'espoir et du courage pour avancer et s'en sortir.

J'ai commencé à devenir malade à l'âge de quinze ans. A l'époque, j'étais en période de deuil suite au décès brutal de ma cousine, et mes parents étaient sur le point de se séparer. J'avais toujours eu une corpulence normale, pesant 58kg pour 1,64 mètre, mon IMC était donc tout à fait correcte. Mais mes amies qui étaient plus grandes de moi, avaient une taille beaucoup plus fine et plus élancée. Fragile émotionnellement et complexée à cause de mes amies, j'ai donc entamé un régime draconien au mois de Mai, en pensant qu'il m'aiderait à me sentir mieux dans ma peau.

Très vite, j'ai éliminé graisses et sucre de mon alimentation sans faire la part des choses. J'ai commencé à faire une heure de course tout les soirs après les cours, et je faisais en sorte de ne plus avoir de temps libre, car je considérais cela comme une perte de temps. A cette époque, je faisais n'importe quoi afin d'être constamment obligée de bouger, de faire du sport, dans le but d'éliminer mes calories en trop. C'est ainsi que je suis entrée dans cette machine infernal qu'est l'anorexie.

Ce régime à eu l'effet escompté, j'ai alors perdu presque 9kg, et à la mi-juillet, mon poids s'élevait à 49kg. Mais je me trouvais énorme. J'ai cessé de manger : une biscotte et un fruit au petit-déjeuner, une salade verte au vinaigre et un fruit à midi et pareil le soir. Je jetais ou cachais ma nourriture dès que j'en avais l'occasion, et je prétextais des activités pour ne pas aller au restaurant avec mes parents, ou manger à la cantine le midi. En parallèle, j'essayais d'être la meilleure partout, que ça soit au lycée, au sport, ou encore avec mes amis.

Avec la perte de l'appétit est peu à peu arrivée une perte de la joie de vivre. Moi qui était une fille plutôt gourmande, très joyeuse, sociable et qui croquais la vie à pleine dents, je suis devenue un fantôme, l'ombre de moi même. Rire était devenu un effort insurmontable. Mes amis me voyaient changer sans pouvoir rien faire et ma famille elle, mit du temps à réagir. A présent, je n'avais plus qu'un but : être la meilleure, la plus intelligente, la plus douée. Je voulais avoir encore plus de courage et de volonté. Et surtout, je voulais perdre le plus de calorie possible. Mes règles se sont alors arrêtées.

En Août, mon poids s'élevait à présent à 46kg. Ne mangeant plus de protéines du tout, je perdais tout mes muscles et toutes mes forces. Moralement j'étais anéantie, je broyais du noir, me sentais seule et triste. J'avais le regard vide et des pensées suicidaires. En Septembre, je suis entrée en classe de première. Je me suis alors mise à bosser de manière acharnée et en continuant à me sous-alimenter. Je ne voulais rien faire d'autre. Je dormais peu, me couchant à 2h de matin pour me lever à 6h. J'enchaînais les cafés pour rester éveillée et je continuais à aller courir avec acharnement tout les matins et tout les soirs avant et après le lycée. Je ne savais plus faire de pause et passer du temps à ne rien faire. J'en étais incapable.

Mes parents étaient très inquiets et ont menacés de me placer dans un hôpital. Mais leurs menaces de m'impressionnaient pas. Ils ne dormaient plus, prenaient très souvent plusieurs journées de repos, et appelaient régulièrement le médecin. Mais peu m'importait que mon entourage souffre, je me trouvais toujours énorme et il fallait encore que je continue de maigrir. J'ai alors été obligée de refaire ma garde-robe puisque plus rien ne m'allait. J'étais devenue un tas d'os, mes joues étaient creuses et j'avais constamment la peau pâle. J'étais une branche d'arbre qui pouvait se casser au premier coup de vent. En hiver, mon poids était à présent de 41kg. Me peser était devenue une obsession et gagner 100g me rendait malade. Je voulais perdre encore et encore. L'anorexie était devenue une drogue pour moi, et une petite voix me soufflait jours et nuits : maigris, maigris tu peux le faire.

Ma mère a alors instauré des pesées quotidiennes. Elle exigeait de surveiller mon poids et voulais me voir grossir. C'est alors que j'ai commencé à tricher. Je portais des vêtements amples qui me permettaient de cacher des objets lourds et je buvais énormément d'eau, dans le but de tromper ma mère sur mon véritable poids. Je n'ai rien mangé, ni a noël ni au nouvel an. Je perdais mes cheveux par poignées et j'avais de très fortes douleurs osseuses. En février, je ne pesais plus que 38.5kg. Et c'est alors qu'un jour, ma mère a décidé de me peser à l'improviste. Je n'ai pas eu le temps de tricher sur mon poids. Et la, ce fut le choc pour elle, du haut de mes 38.5kg il était devenu nécessaire de me placer dans un hôpital. Je ne tenais pratiquement plus debout et mon corps ne suivait plus ma tête. Ma mère a alors fondu en larmes, mon père est arrivé dans la pièce et elle s'est jetée dans ses bras en sanglotant de plus belle. Aujourd'hui, je pense sincèrement que c'est ce qui a été le déclic pour moi. Je leurs ai donc annoncé que je voulais guérir, que je voulais m'en sortir car je n'avais plus d'amis, plus de joie de vivre, je ne voulais plus supporter cet état de dépérissement avancé qui était en sois pire que la mort.

Mes parents m'ont donc fait hospitalisé dans un centre spécialisé. Là-bas, j'ai été coupée de tout. Je n'avais plus aucunes nouvelles de mes proches et je voyais un psychiatre deux fois par jours. Une fois le matin et une seconde fois le soir. Les médecins m'ont fait passer un «contrat» : j'acceptais de reprendre du poids, et de travailler sur moi-même, et je pourrais revoir mes proches. Deux mois plus tard, j'avais regagné presque 4kg et les médecins m'ont permis de revoir mes parents. J'ai pleuré quand je les ai vu. Malheureusement, je n'avais pas encore atteint mon poids de sortie et je n'ai pas pu repartir avec eux.

En Août je n'avais pas beaucoup repris mais mon poids était resté plutôt stable. Et pour m'encourager dans mes efforts, les médecins m'ont alors placés dans une chambre double, que je partageais avec une autre anorexique. Nous avons très rapidement noué des liens, et j'ai peu à peu commencé à reprendre goût à la vie. Cela faisait maintenant cinq mois que j'étais ici, et j'avais vu mes proches seulement trois fois. Fin Août, ma colocataire a quitté définitivement l'hôpital et je me suis retrouvée seule. C'est là que j'ai rechuté. En l'espace d'un mois j'ai perdu 5kg et les médecins m'ont menacés de la sonde naso-gastrique afin de me nourrir si je ne reprenais pas de poids. Ils ont aussi cessé de me transmettre les lettres de mes proches, et j'ai été interdite de visite. Je me suis à nouveau retrouvée seule, et j'ai finalement réalisé que les efforts que j'avais fourni pendant six mois avaient été réduit à néant. Je m'étais démenée pour rien et je devais tout recommencer à zéro. J'ai beaucoup pleuré pendant cette période la. J'étais aussi très nostalgique et je relisais beaucoup les lettres que j'avais reçu des mois plus tôt.

En Octobre, j'avais repris seulement 2kg et j'avais l'impression que je n'allais jamais sortir d'ici. Un jour, alors que je sortais de chez la psychiatre, j'ai croisé mon ex colocataire et amie. Elle avait un corps magnifique, avec de belles courbes et portait des vêtements moulants, elle souriait. Lorsqu'elle m'a vu, ses yeux se sont écarquillés et elle est venue me prendre dans ses bras. Elle m'a alors dit une phrase qui m'a redonné de l'espoir : «Je t'attend dehors».

Le 24 Décembre qui a suivit, j'avais atteint le poids de sortie autorisé. J'ai donc pu passer noël avec ma famille, j'avais toujours un suivis médical mais seulement trois fois par semaines. Et j'ai repris le lycée mais à domicile cette fois, car je ne me sentais pas capable de retourner là-bas pour le moment. Aujourd'hui, je sais que je suis guérie. Je pèse 56kg pour 1.67 mètres, je suis souriante et bien dans ma peau. Je suis à nouveau la fille sociable, pleine de vie, de rêves et d'espoirs que j'étais avant. Je côtoie régulièrement ma nouvelle amie qui m'a beaucoup aidée à me réintégrer dans la «vie normale», et je suis beaucoup plus proche de ma famille qui m'a soutenue jusqu'au bout.

Je sais que j'ai beaucoup de chance d'avoir réussi à m'en sortir. Le chemin de la guérison est long et dur, mais je sais à présent qu'il n'est pas impossible à surmonter. La vie est trop précieuse pour être gâchée de la façon dont j'ai faillit gâcher la mienne. Il ne faut pas hésiter à en parler, à se confier et à chercher de l'aide le plus tôt possible car on ne peut jamais s'en sortir seule.

Et aujourd'hui, je tiens à encourager toutes les anorexiques qui veulent guérir. Vous êtes assez fortes pour y arriver, même si c'est long et même si vous rechutez. La vie mérite d'être vécue à 200 pour-cent, n'abandonnez jamais parce que vous trouvez le chemin trop difficile. Et surtout, sachez que vous n'êtes pas seules. Vous avez des amis, de la famille qui tiennent à vous et qui sont là pour vous aider à vous battre coûte que coûte. Il est très facile de tomber dans l'anorexie, mais encore plus difficile d'en sortir. La guérison nous permet de nous endurcir à condition de ne jamais lâcher prise. Alors si jamais il vous vient un jour l'envie d'entamer un régime, parlez en autour de vous afin que l'on vous surveille.

Ne perdez jamais espoir.

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